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Jacques Mandrin

Auteur van Socialisme ou Social-Médiocratie

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L’Enarchie ou Les Mandarins de la société bourgeoise

Chevènement, Motchane et Gomez, jeunes hommes pleins d’avenir prennent le pseudonyme de Jacques Mandrin pour rédiger ce pamphlet contre l’Ecole Nationale d’Administration, L’Enarchie ou Les Mandarins de la société bourgeoise. Le titre initial devait être L’ENA Bouffe, en référence aux bouffes parisiennes, célèbre théâtre. Mais Gomez préfèrera donner le titre actuel. Une connaissance commune, Roland Laudenbach, leur propose de publier leur texte dans sa maison d’édition La Table Ronde de Combat.
Deux idées principales retiennent l’attention des penseurs socialistes : le fonctionnariat et le fonctionnement de l’État socialiste ; autrement dit son Administration. Aussi, le sujet abordé par Chevènement et ses amis est au cœur d’un questionnement socialiste. En effet, la formation des fonctionnaires et la place de ces derniers dans un état socialiste sont des problèmes qu’il faut résoudre pour mener à bien l’état socialiste. Or, force est de constater que les gauches n’ont jamais construit de manière doctrinale une conception de l’État et n’en ont que peu tiré les conséquences lorsqu’ils en étaient à la tête. Les progrès des sciences sociales ont aussi permis une remise en question des fondamentaux marxistes ou jaurésiens de l’état, notamment dans la reproduction des classes et des dynasties des hauts fonctionnaires.
Par-delà l’aspect pamphlétaire de L’Énarchie, la force et l’apport du groupe Jacques Mandrin à la refonte de la formation et des missions des hauts-fonctionnaires sont significatifs dans le débat de l’époque. Car, L’Énarchie ou Les Mandarins de la société bourgeoise est une œuvre étrange. Elle mêle les souvenirs d’un jeune énarque attaché à l’institution qui l’a formé, les critiques de jeunes socialistes radicaux qui viennent de fonder le CERES et les propositions d’intellectuels en quête de publicité pour leurs idées novatrices… Ce livre de plus de cent-cinquante pages, se présente en deux parties de tailles inégales. Les premières pages traitent du parcours type d’un énarque quand les dernières constituent un catalogue de propositions et de remarques sur l’École ; sorte de court programme politique de réformation de l’institution dans son ensemble, de la formation des impétrants à leurs différentes tâches et fonctions au sein de l’Administration – socialiste cela s’entend.
L’Énarchie se présente avant tout comme un projet particulier pour l’Administration d’un Etat socialiste. Partant d’institutions existantes, Chevènement et ses camarades du CERES ne souhaitent pas la Révolution mais bien la mise en place du socialisme par l’intermédiaire d’outils comme l’ENA, alors alliée du néocapitalisme. Réformée, rationalisée et perfectionnée, l’Administration et les administrateurs ne sont plus une caste au sein de l’Etat – un état dans l’État – mais bien un service, des commis, des instruments du pouvoir socialiste. La morale et l’esprit des institutions étant révolutionnés, les fonctionnaires ne sont plus des propriétaires de charge mais de véritables dépositaires responsables de la gestion et du pouvoir public.

Chevènement part du constat qu’il n’existe pas d’égalité réelle dans la société bourgeoise donc capitaliste ; comme si l’égalité était un fantasme dans les démocraties libérales. « Les républiques bourgeoises ne peuvent pas grand-chose pour l’égalité » Il oppose de facto la conception utilitariste qui favorise le plus grand nombre à l’idéal républicain qui veut que tous les hommes soient égaux. Aussi, si l’Etat bourgeois favorise quelques pauvres, il ne les aide pas tous. En ce sens, la république bourgeoise est une imposture aux yeux de Chevènement. Car l’Etat bourgeois a besoin de sélectionner une minorité qu’elle promeut sous couvert de mérite démocratique alors qu’il s’agit bien davantage de « revêtir la livrée de l’oligarchie ».
Aussi, les grandes écoles constituent pour l’Etat bourgeois un excellent moyen de formation des cadres. L’Ecole Nationale d’Administration est aux yeux de Chevènement le meilleur moyen de conservation du pouvoir mais aussi de gestion de l’Etat bourgeois. En effet, si l’ENA est née de la Révolution française, la Résistance l’a créée et la République en a consommé l’échec. L’ENA a vu le jour dans la tête de révolutionnaires, a tenté de percer sous la Troisième République bourgeoise, cela-même qui a vu naître l’Ecole libre de Science Politique, mais a trouvé son accomplissement sous la Quatrième par l’ordonnance du 10 octobre 1945 en révolutionnant « le vieux système des castes et des grands corps ». En somme, le concours d’entrée de l’ENA changeait la donne dans la sélection du « service public ». Mais, la République a « dévoyé » l’Ecole. Toutefois, l’ENA reste un objet utile dans la gestion de l’Etat et l’organisation de l’Etat socialiste ; voici pourquoi il est nécessaire d’en parler pour Jean-Pierre Chevènement.

Avant de traiter à fond des réformes à apporter à l’Ecole Nationale d’Administration, Chevènement raconte, avec un lyrisme et un ton cynique, le parcours type d’un énarque ; donc le sien et celui de ses collègues. Il présente donc une critique en règle de l’Institution en commençant par un constat pour le moins déroutant : « Seule l’ENA n’a pas de légende ». Il est vrai qu’en 1967, l’Ecole vient à peine de rentrer dans l’âge de majorité. A l’inverse des autres institutions scolaires et universitaires formant les grands cadres de la nation, telle l’ENS ou X, l’ENA n’a pas d’histoire merveilleuse. L’ENA ne fait rêver aucun étudiant face à la prestigieuse rue d’Ulm ; l’Ecole a-t-elle seulement eu un professeur ou un étudiant célèbre pouvant par son seul nom émouvoir l’œil attendri d’un jeune homme ou d’une étudiante ? Non affirme-t-il car l’ENA est « une maison sans façade mais non sans fondations ».
La vraie critique de l’ENA doit commencer par celle de Science-Po. L’IEP est la première cible de l’énanisme car pour Chevènement, Gomez et Motchane, « Science-Po est la maison, l’ENA reste l’antichambre ». Cette « Maison » est vigoureusement traitée. Les cours et la méthode, l’enfermement de la pensée, la création d’idoles, l’uniformisation des élèves par le savoir-être, le savoir-faire et le savoir-vivre. Les professeurs sont raillés et la façon de penser et d’entreprendre qu’ils impriment à leurs étudiants est moquée avec force. « Les élèves n’ont guère à forcer » affirment les auteurs puisqu’ils sont souvent les enfants de hauts-fonctionnaires, de personnalités ou d’hommes influents qui – bien souvent – ont été étudiants de la rue Saint-Guillaume. Les manières et le langage sont aussi mis à l’épreuve. Les façons de parler trop policées, trop précieuses et ampoulées, sont considérées comme un art dont les sciences-po doivent rapidement maîtriser les rudiments car la parole devient l’arme du « progrès immobile », le bouclier de « versificateur de bureaux ».
Ainsi, les premières critiques concernent la reproduction sociale qu’alimente l’IEP de Paris. Science-Po forme une caste plus qu’elle ne constitue des intellectuels. Cette caste de futurs « majordomes du capitalisme », des pantins et des serviteurs en herbe de la classe bourgeoise, de la classe dominante. Les meilleurs peuvent dès lors se lancer sur le chemin de la consécration, l’ENA.

Le concours d’entrée à l’ENA représente donc une privation sociale au profit des plus aisés par l’intermédiaire des castes, des groupes et des écuries. Les réseaux et les anciens de la « Maison » jouent alors un rôle énorme dans la préparation au concours. Le concours d’entrée est donc une confiscation par la classe dominante ; l’ENA ne doit recevoir que des élèves de l’IEP.
De cette remarque, un autre constat s’impose : la création de dynasties de hauts fonctionnaires. Ces dernières se conçoivent comme un corps défendant ses propres intérêts, et non plus ceux de la France. Ils ne pourvoient pas à l’intérêt général mais à l’intérêt particulier : le leur. Ce corporatisme est d’une sévérité malsaine. Le classement et le rang des impétrants lors du concours d’entrée jouent un rôle et déterminent une future potentielle place au sein de l’Administration. La rudesse du concours d’entrée est un condensé de la bêtise de Science-Po pour Jacques Mandrin. Il faut avec un style de gratte-papier résoudre des problèmes sur lesquels les ministres sèchent. Sujet technique et sujet de dissertation alternent pour laisser place à la « conversation » avec un jury de dix personnes, dix énarques, dix professeurs qui vérifient que l’énarchisant peut par les savoirs qu’il a acquis devenir énarque. En somme, ces hommes vérifient que l’étudiant leur ressemble et laisse percer un futur fonctionnaire.

Admis dans le saint des saints, le sommet et l’accomplissement d’un parcours universitaire, l’énarchisant devenu énarque se rend compte que l’Ecole Nationale d’Administration n’est pas une école. En effet, l’ENA ne forme pas, elle sélectionne, classe et fixe continuellement un rang au sein de ses promotions. Il y a certes quelques cours mais ils ressemblent davantage à des ateliers où l’on doit briller par sa méthode et ses performances oratoires.
Aussi, il faut participer aux différents stages sanctionnés par des rapports et un classement. Le tout premier – extrêmement bourgeois – est consacré au service militaire ; car bien diriger une administration c’est un peu commander un bataillon ou une armée. En somme, il est bon de savoir manier une arme avant de savoir se servir d’un porte-plume. Revenu avec sa quille, l’enarchiste participe à des séminaires qu’il organise. Les étudiants rivalisent alors en choisissant un sujet aussi ardu que pompeux en opposant souvent des termes : « Le Préfet de région et la planification des investissements », ou bien « Cybernétique et Administration ». Enfin, le stage dans l’Administration dans un poste à responsabilités et un autre dans une entreprise viennent clore le cycle des formations. Le parcours se conclue sur une série de quatre examens ; rang et classement ajustent la place de l’énarque au sein de l’école.
Par-delà le cycle d’étude, la scolarité est longuement abordée sous de nombreux aspects. La sexualité quasi-inexistante des énarques est traitée. La solitude contrainte car il n’y a pas d’amitié à l’ENA, seulement des groupes d’études, des affinités de travail. Le travail, voilà la seule chose qui consomme le temps d’un énarque. La méthode de travail de l’ENA consiste simplement à présenter l’information telle qu’elle est, l’analyser sans la politiser. Le travail de formation de l’énarque consiste à rédiger un maximum de fiches qu’un ministre pourrait utiliser pour répondre à des journalistes. D’ailleurs, « l’ENA, en elle-même, n’est guère qu’une école de journalisme ». Ces dossiers attisent bien évidemment la convoitise des nouvelles promotions qui – moyennant finances – sont prêts à tous les excès pour obtenir les volumes de notes…
Journaliste, peut-être mais journaliste stressé, assurément. Des nombreuses pages de Motchane, Gomez et Chevènement, il en ressort ce constat : le stress permanent des étudiants énarques. Le stress s’invite rapidement. Par la méthode de travail, le classement et le rang condamnant l’étudiant à envisager une échappatoire, une porte de sortie s’il n’obtient pas le poste dans la branche de l’Administration qu’il désire. Le stress aussi quand il n’est pas dans le dogme et l’esprit de corps, quand il ne communie pas à cette grand-messe des papes de l’Administration. Les dépressions sont nombreuses car la concurrence, le poids de la direction, des professeurs et maître de conférences sont lourds. L’amaigrissement est un excellent indicateur pour le médecin de l’école. Ce stigmate suffirait à légitimer la réforme de l’Ecole.
Au final, qu’est-ce qu’un énarque pour Chevènement et ses amis du CERES ? Un bureaucrate aseptisé, qui vivra la neutralité comme un devoir et se fera un principe de ne pas prendre parti ; il devra se dépolitiser dans la forme et dans le fond de ses conceptions, de son travail et dans ses rapports tant humains que papiers. Un énarque est une personne intelligente que l’on a abêtie en uniformisant sa pensée, un instrument de l’Administration donc un pion utile de la société bourgeoise. Après tout, « l’énarque n’est-il pas commis à la gestion du patrimoine social et culturel de la bourgeoisie ». Un énarque est un « syndicaliste jaune » favorisant les intérêts du corps, puis l’intérêt général par le système du consensus car le véritable énarque sous couvert de neutralité n’est pas un personnage de décisions. Le consensus c’est la fin de la lutte de classes, la bourgeoisie l’a bien compris tonne Chevènement.
En somme, un énarque tel qu’il est créé par l’ENA dans les années de parution du livre est un technocrate. Or, pour Jacques Mandrin, la technocratie n’existe pas puisqu’elle n’est qu’un prétexte pour la bourgeoisie qui sous couvert de former des administrateurs place en fait des gestionnaires. Ce sentiment arrange tout le monde. Les « oligarques » qui se satisfont de ne pas être le visage mais simplement le cerveau, le peuple qui malgré ses cris y voit là une forme malheureuse de son destin et les technocrates eux-mêmes puisqu’ils n’ont pas de pouvoir décisionnel. En ce sens, les énarques sont des mandarins. « Eunuques » puisqu’ils n’ont aucun pouvoir, grands et beaux esprits plongés dans l’adoration presque idiote et idolâtre du service de l’Etat, donc du pouvoir. Ils sont les fidèles conseillers, les membres de réseaux, les gestionnaires de tel ou tel service ou branche de l’Administration. Ils se connaissent et font corps. Aussi, les énarques représentent un danger pour la démocratie puisqu’ils s’entraident et favorisent la création d’un état au sein de l’Etat, le leur…

Le constat étant fait, il ne reste plus pour Chevènement qu’à proposer des solutions aux différents problèmes que rencontre l’ENA. L’ensemble de cette seconde partie du livre est plus théorique voire conceptuelle. Peut-être est-ce un formidable pied-de-nez à l’IEP et à l’ENA que d’avoir fait un livre en deux parties seulement…
Chevènement affirme que l’énarchie est un système, un instrument de domination de la classe bourgeoise qui se dissout dans la matrice des intérêts privés ; « le capitalisme, qu’elle émascule pour le perpétuer ». Ce système n’est aimé de personne – tant la droite que la gauche. Désormais institué que faut-il en faire ? Le garder ou le supprimer ? Aussi, avant de donner une réponse, Jacques Mandrin préfère considérer le rôle de l’Etat dans la construction du socialisme.
L’Etat est un outil à « la redistribution des pouvoirs des responsabilités entre les différents acteurs du système conforme à la démocratie ». Aussi, l’Administration doit pour assurer le bon fonctionnement de l’Etat socialiste être loyale et efficace. La centralisation est donc une condition nécessaire pour faire prévaloir l’esprit de service sur l’esprit de corps. Dans la logique des choses, il faudrait donc fermer l’école. Or, l’ENA n’est qu’un système affirmant l’affaiblissement de l’Etat, c’est-à-dire de sa morale.
Certes, l’argument n’est pas décisif. Aussi, convient-il « pour assurer à la fois les libertés et la bonne marche des services, d’équilibrer la politique par la compétence, c’est-à-dire par le maintien d’un corps spécialisé de fonctionnaires ». L’état socialiste – par l’intermédiaire du mouvement ouvrier – a donc besoin de ses élites ; s’il ne le fait pas, la dictature s’impose d’elle-même. Or, le socialisme est l’extension de libertés pas la restriction. Ainsi est-il préférable de conserver des hauts-fonctionnaires mais, il est nécessaire de créer une stricte séparation des fonctions existantes.
Le fonctionnariat doit donc être rénové si ce n’est révolutionné. Les fonctionnaires doivent perdre cet esprit de corps, ce comportement de propriétaire d’une « charge publique ». L’Etat socialiste doit faire des fonctionnaires, dans la pleine acception du terme, des commis. Abattre le corporatisme pour inoculer dans l’esprit et les pratiques des fonctionnaires, la notion de service : servir les citoyens ; non des consommateurs mais des usagers car ils en sont les propriétaires.
La première étape pour réformer l’ENA est évidente : la refondation de l’IEP. Aussi, la création de classes préparatoires avec un programme adéquat semble une nécessité pour Chevènement. La Maison de la rue Saint-Guillaume étant court-circuité, le recrutement le plus large doit voir le jour et notamment en province. Il s’agit d’un premier pas vers la démocratisation. La régionalisation du recrutement de l’ENA s’intègrerait harmonieusement avec la création de classes préparatoires dans les lycées qui comptent déjà des hypokhâgnes et des khâgnes pour les matières littéraires. Chevènement évalue à près d’un millier le nombre de candidats. Il propose même la création d’un tronc commun affirmant qu’il « semble logique que ceux qui sont destinés à servir les valeurs d’une société et ceux qui doivent les enseigner au plus haut niveau reçoivent une formation de base commune ». Les candidats refusés se verraient acceptés dans des écoles régionales formant des agents du cadre A regroupés dans la catégorie des « attachés d’administration ». Dans tous les cas, de grandes possibilités de passerelles entre les différents enseignements seraient aménagées.
« La création d’une pyramide d’écoles d’administration n’aurait pas de conséquences infamantes » affirme Jacques Mandrin. Si Chevènement affirme cela, il s’appuie sur l’exemple des Ecoles normales et de l’ENS. Or, cela semble contradictoire dans la théorie et la pratique car en créant deux écoles, il met ipso facto en concurrence deux formations et instaure un enseignement à deux vitesses. La preuve en est donnée actuellement avec les universités, les IUFM et les Grandes Ecoles.
Le concours serait toutefois une double exigence de justice et d’efficacité pour les deux écoles, Nationale et régionale. Le nombre de places serait fixé en fonction des besoins de l’Administration. Ce « concours unique » ne supprimerait toutefois pas le classement car il permettrait de sélectionner les meilleurs pour l’ENA et les autres auraient accès aux écoles régionales. Les épreuves seraient revues afin de tester non pas les savoirs mais les aptitudes et la pédagogie dont l’impétrant ferait preuve. Deux épreuves orales viendraient achever le concours, une première de langue – deux de préférence – et la seconde resterait identique à l’actuelle mais la durée en serait allongée afin de mieux sonder le candidat plus que le mettre à terre.
L’école doit aussi être rénovée. Chevènement et ses camarades proposent trois aménagements. Premièrement, en plus de la formation de l’ENA, les élèves recevraient –comme à l’ENS de la rue d’Ulm – un complément dans une autre discipline avec un diplôme universitaire à la clef. A ce grade universitaire, il serait adjoint un certificat d’aptitude destiné à enregistrer des connaissances pratiques dans les statistiques, la comptabilité, l’organisation du travail ; sorte d’initiation administrative. Deuxièmement, les stages seraient condensés la dernière année et sanctionnés par « un travail écrit réalisé individuellement ou en commun ». Enfin, le dernier aménagement concerne le concours de sortie avec la suppression du classement final. La refonte de l’Ecole implique donc une spécialisation dans les contenus pédagogiques de l’ENA mais aussi une polyvalence extérieure par l’acquisition d’autres diplômes universitaires.

La formation et l’éducation des membres des écoles achevées, il est nécessaire de « révolutionner » l’administration et les conceptions de service public. Aux yeux de Jacques Mandrin, l’Administration socialiste suppose « une spécialisation et l’incompatibilité des tâches », et a trois fonctions.
La première fonction est administrative c’est-à-dire la conception des entreprises de la puissance publique et de gestion, au plus haut niveau, de ses services. Il est dès lors essentiel de différencier les tâches et les fonctions au sein des postes que les énarques briguent. Pour les distinguer, un classement serait constitué. Il serait basé sur les compétences et des dossiers récapitulant les parcours et les connaissances seraient mis à jour. Dans leur conception de l’Administration, Chevènement considère que les énarques seront amenés à oublier dans un travail de gestion courante et devront être gérés par le Premier ministre ou le Président. La mobilité serait accrue – environ tous les trois ou quatre ans. L’objectif semble donc de former des hommes et des femmes qui abandonneraient l’idéal d’une place tout au long de leur vie. Ces membres de l’administration deviendraient des « commis de la République » ; cela ne va pas sans rappeler les commis de la toute Première République. Aussi, la revalorisation de la fonction et du mérite sont au cœur de la réforme de la fonction administrative ; en opposition avec l’esprit de corps, l’esprit de lutte des places et la concurrence que Chevènement critique.
La juridiction administrative serait aussi réformée. Une modification du recrutement des fonctionnaires juges devrait être mise en œuvre. L’instruction et la préparation des dossiers incombant aux auditeurs issus de l’ENA pourraient être confiées à de jeunes magistrats formés dans les centres d’études Judiciaires. Après dix années de service, ces derniers pourraient obtenir des fonctions équivalentes à celles de Maîtres des requêtes ou de Conseillers d’Etat. L’objectif semble donc de favoriser les liens entre deux administrations dans un premier temps. Puis, lorsque les administrateurs sont promus à des postes supérieurs, l’intérêt de la réforme suppose avant tout l’apport de connaissances précises du terrain, une connaissance pratique des problèmes de l’Administration.
« La dernière fonction, le contrôle de la régularité, de l’opportunité et du coût des actions administratives est indispensable à la bonne marche des affaires ». Une Cour spéciale de Contrôle Comptable et Financier placée sous la responsabilité du Parlement assurerait les fonctions techniques et budgétaires des différentes commissions. Y seraient admis les administrateurs les plus âgés. Les actions secondaires seraient laissées aux plus jeunes. Comme dans la précédente fonction, la rationalisation est au cœur de la réforme.
Enfin, une dernière fonction s’intégrant dans une perspective d’Administration socialiste doit être mise en œuvre : la gestion des entreprises publiques. L’Etat devrait donc sélectionner des entrepreneurs issus des écoles spécialisées de commerce. En revanche, les administrateurs seraient chargés de la tutelle du contrôle et non pas de la gestion. La conception de Jacques Mandrin est donc de favoriser un service public dont la gestion est laissée entre les mains d’entrepreneurs mais le contrôle est aux mains d’un administrateur.
Chevènement, Motchane et Gomez concluent sur ce que sera le fonctionnaire socialiste, ouvrant large sur ce que sera l’Etat socialiste. Le socialisme ne peut se concevoir sans utiliser l’appareil d’Etat. Toutefois, l’Etat et l’Administration ne sont que des outils et le socialisme a pour seul moteur le peuple. Un véritable fonctionnaire devra donc abandonner l’esprit de corps pour devenir commis du pouvoir socialiste. L’énarque sera donc responsable devant l’Administration mais aussi devant le peuple qu’il sert. Il sera jugé sur sa tâche. « Les administrateurs peuvent être à la République Française Socialiste et Démocratique ce que les instituteurs furent à la IIIème République : ses hussards » ; constatons le vocabulaire et la volonté, l’inspiration. La morale socialiste doit donc relever le fonctionnariat.
… (meer)
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T.VALERO | Jan 31, 2016 |

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