Laurent Noerel

Depuis qu’il a accédé à la conscience, l’homme porte sur le monde qui l’entoure des regards souvent marqués par la peur. Une peur justifiée par la violence des éléments, par la sauvagerie des prédateurs. Une peur que son imaginaire a développée, lui montrant derrière les manifestations de la nature des entités occultes, parfois divines et alors instauratrices, malgré leur éventuelle cruauté, d’un équilibre, parfois moins nobles et plus obscures, plus meurtrières. Des entités auxquelles il s’est confronté dans ses réalisations artistiques, dans ses œuvres littéraires. Laurent NOEREL, dans ses précédents recueils, a déjà mis en scène quelques-unes d’entre elles, issues de traditions fantastiques, comme les loups-garous ou les fantômes, ou plus mystérieuses, mais tout aussi cruelles.

Cependant, d’autres sources d’effroi existent, d’autres forces mauvaises, peut-être plus discrètes mais pas moins redoutables. Le mal ne s’exprime pas seulement dans les actes de créatures extérieures à l’homme, il se dissimule également en lui-même, dans certaines de ses émotions, refoulées ou clairement manifestées. L’homme est traversé par de multiples désirs qu’il ne maîtrise pas toujours, et une partie d’entre eux peut l’inciter à nuire à ses semblables. L’influence de ces désirs pervers, ou la perversion d’aspirations au départ positives, constituent une source d’inspiration non négligeable pour la littérature fantastique, et Laurent NOEREL, dans ce nouveau recueil, intitulé « La pénombre des âmes », s’y intéresse plus particulièrement.

En effet, si, dans « La naissance menaçante », premier récit de ce recueil, une puissance surnaturelle est bien présente, elle est maintenue dans le sommeil, et c’est le gourou d’une secte qui, par l’emprise qu’il exerce sur ses fidèles, par la manipulation de leurs émotions, s’efforce de la réveiller pour lui permettre de dominer les humains. L’accent est donc mis sur la perversion idéologique des gourous, et cette exploration des bas-fonds de l’âme humaine se poursuit dans le second récit du recueil, « Les silhouettes errant entre les arbres », où des événements surnaturels sont causés par une haine aux origines inconnues mais d’une intensité inimaginable.

Dans ces deux récits, Laurent NOEREL nous convie à un nouveau voyage au milieu des ombres. Vous qui vous y risquez, prenez garde à ne pas perdre votre chemin, et gardez l’œil fixé droit devant vous, en quête d’une lueur salvatrice… si toutefois les ténèbres en ont laissé survivre.… (meer)

Après « Les victimes de l’ombre », Laurent NOEREL nous invite à une nouvelle errance au milieu des ténèbres, à une confrontation avec deux puissances maléfiques, avides d’imposer à l’humanité leur suprématie.

Dans un premier récit, composé des textes : « Je te rejoindrai » et « Les désirs souillés », nous assisterons à la conclusion d’une guerre séculaire entre une organisation occulte, représentée de nos jours par deux de ses membres, Karim et Christelle, et une étrange créature tirant son pouvoir des perversions de l’âme humaine, notamment des tensions idéologiques opposant différentes communautés, dont celles de Karim et de Christelle. Ceux-ci, assistés par un être mystérieux nommé « L’errant » qui traque leur ennemi depuis plusieurs centaines d’années, devront trouver une réponse aux raisonnements corrompus des fanatiques pour espérer remporter ce duel.

Le second récit, composés des textes « L’eau de Viviane » et « Les forces de l’abîme », nous montrera les crimes commis par un cavalier noir, être maléfique foulant de nouveau la terre après des siècles de sommeil, dans une Europe déjà ensanglantée par des guerres qu’il a lui-même suscitées et qui menacent de reprendre. Face à cet être qui sait manipuler leurs émotions les plus secrètes, les humains bénéficieront d’une aide inattendue, celle de héros d’une légende ancienne, qui reviendront pour s’opposer à l’armée du cavalier, dont ils ont combattu, longtemps auparavant, les serviteurs.

Laurent NOEREL s’essaie dans ce recueil à une forme différente de fantastique, où l’irruption du surnaturel permet d’explorer les dérives idéologiques de l’âme humaine. Car si le fantastique nous permet d’exprimer nos peurs devant des phénomènes, des réalités, qui nous dépassent, il nous offre aussi la possibilité d’explorer notre propre complexité, les multiples pulsions qui vivent en nous, et nous attirent vers la lumière ou vers l’ombre.… (meer)

Des vers d’Émile Verhaeren flottent dans ma mémoire :

Elle est venue la nuit, de plus loin que la nuit
À pas de vent, de feu, de loup, de pièges…

Et ces vers, je les retrouve dans le recueil les Victimes de l’ombre de Laurent NOEREL. Je ne puis m’empêcher d'être hanté par eux tandis que je poursuis la lecture de ces contes où l’angoisse le dispute à la terreur.

Ce qui crée le fantastique, selon Roland Barthes, c’est l’hésitation entre une explication rationnelle et une explication surnaturelle d’un fait à l’intérieur d’un récit. Mais Laurent NOEREL redéfinit cette notion en nous présentant sa conception du fantastique dans ce recueil : il s’agit pour lui de maintenir du début jusqu'à la fin de chaque récit un climat d’angoisse qui sert, pour ainsi dire, de vêtement à la narration ; elle s’en recouvre pour mieux amener le lecteur d’épisode en épisode, jusqu’au terme d’une poursuite ou d’une exploration dans les domaines occultes de la terreur ou d’une anxiété latente. En vérité, s’il existe dans ce recueil une forme d’hésitation, c’est bien entre ces deux sentiments qu’elle se produit, page après page.

En fait, dès qu’il se plonge dans ces aventures où dominent les ténèbres, le lecteur sent s’abattre sur lui une chape d’épouvante secrète, comme une menace qui lui impose sa compagnie. Il s’enfonce alors, presque malgré lui, dans un cheminement qui, bordé d’épisodes parfois violents, plonge dans un inconnu terrifiant, tandis que le chemin devient toujours plus noir, toujours plus angoissant, et sans lui permettre de s’échapper.

En effet, entrez donc dans le cortège de ces Victimes de l’ombre et vous en ferez partie : vous serez à votre tour victime d’une puissance d’évocation grisante qui confère à la lecture l’aspect d’une initiation à la terreur. La lecture achevée, vous en ressortirez comme blindé : peut-on avoir peur après avoir parcouru ce recueil jusqu’au bout ? Certes non, c’est impossible. Par contre, on sait alors comment aborder la peur : comme une sorte d’ivresse lénifiante, dont le flacon ne tarit jamais et qui vous cause un sentiment d’égarement né de l’appréhension.

C’est cela, le plaisir de la lecture des Victimes de l’ombre. C’est ce que nous réserve l’auteur de ces contes qui doivent prendre une place bien méritée parmi les œuvres marquantes de la littérature des ténèbres.

Thierry ROLLET
Agent littéraire… (meer)